Quels sont les actes conclus avant l'ouverture d'une procédure collective pouvant faire l'objet d'une annulation ?
La période suspecte correspond à la période comprise entre la date de cessation des paiements, telle que fixée par le tribunal, et le jugement ouvrant la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire.
La période suspecte ne peut dépasser 18 mois avant la date du jugement d’ouverture, mais pour certains actes à titre gratuit, elle peut remonter jusqu’à 24 mois.
L'hypothèse est la suivante : votre société est en état de cessation des paiements, vous envisagez de procéder à l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire selon s'il existe des perspectives de redressement.
La question est la suivante : est-ce que vous pouvez procéder à certains paiements, remboursements ?
Nullités de la période suspecte : actes concernés
Durant la période suspecte, certains actes accomplis par le débiteur sont frappés de nullité (de plein droit ou à l'initiative des organes de la procédure), afin de protéger l’égalité des créanciers et d’éviter l’appauvrissement injustifié du patrimoine de la société en difficulté.
2.1 Nullités de droit (nullité de plein droit)
Selon l’article L. 632-1 du Code de commerce, sont notamment frappés de nullité de plein droit :
- tous les actes à titre gratuit translatifs de propriété mobilière ou immobilière ;
- tout contrat commutatif dans lequel les obligations du débiteur excèdent notablement celles de l’autre partie ;
- tout paiement, quel qu’en ait été le mode, pour dettes non échues au jour du paiement ;
- tout paiement pour dettes échues, fait autrement qu’en espèces, effets de commerce, virements, bordereaux de cession ou tout autre mode de paiement communément admis dans les relations d’affaires ;
- toute sûreté réelle conventionnelle ou droit de rétention conventionnel constitués sur les biens ou droits du débiteur pour dettes antérieurement contractées, à moins qu’ils ne remplacent une sûreté antérieure d’une nature et d’une assiette au moins équivalente et à l’exception de la cession de créance intervenue en exécution d’un contrat-cadre conclu antérieurement à la date de cessation des paiements ;
- toute hypothèque légale attachée aux jugements de condamnation constituée sur les biens du débiteur pour dettes antérieurement contractées ;
- toute déclaration d’insaisissabilité faite par le débiteur en application de l’article L. 526-1 du code de commerce durant la période suspecte ;
- tout transfert de biens ou de droits dans un patrimoine fiduciaire, à moins que ce transfert ne soit intervenu à titre de garantie d’une dette concomitamment contracté
2.2 Nullités facultatives
Certains actes peuvent également faire l'objet d'une annulation, notamment :
- les actes à titre onéreux ou les paiements pour dettes échues accomplis pendant la période suspecte lorsque ceux qui ont traité avec le débiteur avaient connaissance de l'état de cessation des paiements
3. Mise en œuvre de l’action en nullité
L’action en nullité des actes passés pendant la période suspecte doit être engagée par l’Administrateur, le Mandataire judiciaire, le Commissaire à l’exécution du plan, le Liquidateur ou le Ministère public.
4. Effets de la nullité et sanctions
La nullité de l’acte entraîne son anéantissement, reconstituant ainsi l’actif du débiteur au profit de la masse des créanciers
5. Points de vigilance
- Attention à la date de cessation des paiements qui sera fixée par le Tribunal lors du jugement d'ouverture de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire : Le Tribunal fixe la date de cessation des paiements soit à la date du dépôt de la Déclaration de cessation des paiements ou soit antérieurement à cette date en fonction des premiers retards de paiement (notamment si un de vos créanciers a fait inscrire une sûreté sur votre fonds de commerce).
- Ne pas hésiter à interjeter un appel à l'encontre du jugement d'ouverture de la procédure collective (redressement ou liquidation judiciaires) uniquement sur la partie relative à date de cessation des paiements retenue par le Tribunal.
- L'Administrateur, le Mandataire judiciaire ou le Liquidateur notamment, peuvent également, postérieurement à l'ouverture de la procédure collective (redressement ou liquidation judiciaires) initier un recours à l'encontre du débiteur (la société en difficulté faisant l'objet de la procédure collective) aux fins de remonter la date de cessation des paiements à une autre date que celle fixée aux termes du jugement d'ouverture. Cette action est motivée afin d'initier un peu plus tard une deuxième action, laquelle aura pour but de solliciter la nullité d'un acte litigieux conclu par la société ou le dirigeant.
- Plus la période suspecte (période comprise entre la date de cessation des paiements retenue par le tribunal et l'ouverture de la procédure collective (redressement ou liquidation judiciaires) est grande, plus le risque de voir un acte annulé est grand.
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